Croquis Jean Gérard Dubois
Croquis Jean Gérard Dubois
Mars 2015. L'amour est en bleu outremer cette année.
Mars 2015. L'amour est en bleu outremer cette année.

 

 

 

 

 

EN HABIT DE LUMIERE

  

Un habit de lumière
Un habit de lumière pour ce croquis préparatoire à un grand dessin érotique.

 

Joachim DU BELLAY  (1542)

BAISER
 
 

Quand ton col de couleur rose
Se donne à mon embrassement
Et ton oeil languit doucement
D’une paupière à demi close,

Mon âme se fond du désir
Dont elle est ardemment pleine
Et ne peut souffrir à grand’peine
La force d’un si grand plaisir.

.................... 

 

Détail d'une composition érotique
Détail d'une grande composition

                  A TRAVERS LA VITRE

Détail d'un dessin. Jean Gérard Dubois
Détail d'un dessin. Jean Gérard Dubois
Dessin au fusain - Jean Gérard Dubois
Dessin au fusain - Jean Gérard Dubois

 

 

 

 

 

MADEMOISELLE GIRAUD, MA FEMME

Manuscrit d'Eugène Vermersch. Archives JGD.
Manuscrit d'Eugène Vermersch. Archives JGD.

 

VERMERSCH (Eugène), écrivain et journaliste polémique (1845-1878), l’un des ardents défenseurs de la Commune. Auteur de nombreux opuscules révolutionnaires (La Dictature - Le Droit au vol - La Force - La Grêve - L’Infamie humaine, etc...). Son poème Les Incendiaires  (Imprimé à Londres en 1871) eut un grand retentissement et souleva des clameurs dans toute la presse d’époque. Après la révolution de 1870 il fit partie de la rédaction du Cri du Peuple et fonda le Père Duchêne (7 mars 1871), pastiche de la feuille du même nom rédigée par Hébert en 1793.

 

 

 

Manuscrit autographe signé. 3 pp. in-4. Long et beau texte d’une fine écriture,  énergique défense de l’ouvrage d’Adolphe Belot “Mademoiselle Giraud, ma femme” (à Paris chez Dentu, avec préface d’Emile Zola, 1870, ouvrage ayant obtenu un vis succès d’édition mais considéré par beaucoup comme obscène et immoral.) Il s’agit là probablement du manuscrit original d’un article de critique littéraire, avec quelques rares ratures et corrections. (Archives JGD)

 

 Le livre, vous savez ce qu’il est : tout le monde l’a lu, il est dans toutes les mains, car il a eu sa chance et la gloire d’éblouir les fanges de la critique, de faire monter le rouge aux joues des bourgeois et de chatouiller la curiosité des profanes. Ce n’est point, comme l’ont voulu répéter ceux qui en ont parlé, une réédition, revue et augmentée, de quelques scènes déjà connues - comme les folies amoureuses de Melle de Maupin, ou les perversités voilées de la Fille aux yeux d’or, ou même les raffinements languissants et moites de la Religieuse de Diderot - Non, il y a ici quelque chose de plus vivant, de plus vibrant, de plus chaud, de plus coloré, et si je puis dire, de plus criminellement saisissant. Théophile Gautier, Balzac, Diderot n’avaient porté leur étude que sur des types spéciaux, exceptionnels, anormaux, sur une aventurière, sur une comtesse romantique au sang brulé comme les nerfs, sur une recluse hystérique et dépaysée dans son couvent. Ici ce n’est point cela..”

 

Ici ce sont les petits mystères de la vie bourgeoise dévoilée, c'est un tableau sincère et vécu de cette passion grandissante d'heure en heure, et tantôt victorieuse, qui correspond bien à l'organisme de ce siècle malsain et vicié, ridicule et terrible, énervé et farouche, et dont l'âme, après avoir fait par delà les mers un dévôt pèlerinage à Caprée et à Lesbos, s'en vient s'abattre sur Paris, les yeux morts et les ailes pendantes, et mêlent aux rales de son agonie le hoquet de ses pamoisons.

 

Ah! je conçois qu'il ait, ce livre, sous le nom d'honnêtes susceptibilités, éveillé les colères orgueilleuses… Je conçois que ce temps ait été exaspéré de se voir présenter le miroir enchanté qui accuse minutieusement ses défauts, troque son âme dans ses yeux et traine sur ses lèvres la pensée de son cœur… Il semble que l'auteur soit  (un mot incertain) de ces sacrilèges que du hasard, s'introduisant dans le temple d'Eleusis et qui en dévoilaient les rites obscurs et charmants , certes, il faut le poursuivre avec les torches étincelantes de la vengeance, ce blasphémateur de la Vénus inféconde !... Et la critique n'y a pas manqué. A voir l'ensemble avec lequel elle a donné nous croirions qu'elle a plaidé  pro domo sua, si nous ne connaissions pas ses bévues journalières, l'exquise myopie dont elle s'honore et la brièveté de son….. qui ne lui permet même pas l'emploi des… (quelques mots incertains)

 

Et pourtant quoi de plus vraiment actuel et de plus absolument contemporain que cette aventure de Mme de Blangy et de Paul Giraud ?... C'est de l'histoire! …Et de l'histoire exacte et précise de la minute présente!... C'est une peinture ayant la scrupuleuse fidélité d'une photographie!...Il faudrait, pour le nier, être doué d'une naïveté par trop imberbe!... Que de fois ne nous a-t-on point glissé à l'oreille de ces récits, d'une authenticité troublante, qui, pareils à des guides perfides conduisaient nos imaginations jusque dans cette ile embrasée, où Mme de Blangy avait planté la tente de pourpre ténébreuse de sa fantaisie?... Que de fois à nous autres hommes, des échos ne nous sont-ils point venus caressants et inquiétants, du pays phosphorique et mortel où Sapho expirant laissa tomber sa lyre de feu!... Non!...

 

 

 

Les grandes Dames Romaines, dans la chair desquelles Juvinal et Martial ont enfoncé leurs aiguillons, sont vivantes encore et en bien des endroits, aux courses, aux Italiens, à l’Opéra, aux eaux, partout nous avons contemplé, face à face, leurs avatars !... Non ! Vous n’êtes point mortes, grandes abbesses dont le blason princier se couvrait de poussière dans l’ombre des abbayes du Moyen-Âge, non vous n'êtes point mortes, et voici que chaque jour nous condoyons (côtoyons?) vos filles, vos pauvres filles maladives, à qui vous avez légué le testament de vos ardeurs et de vos souffrances!  

Non frèles et défaillantes amoureuses du dix-huitième siècle, votre souvenir n'est point enterré dans la poudre de vos boudoirs, vos ombres tourmentées ne sont point à tout jamais condamnées à se rouler sur les profonds tapis de vos retraits (?) mystérieux 

 

 !... Relevez-vous, lesbiennes Romaines, nonnes maudites, petites maitresses, et voyez si ce temps a quelque chose à envier au vôtre ! 

 

Non!... Nous vous parlons bien, et c'est pour cela que ce livre a un grand mérite qu'on ne peut lui méconnaître: celui de l'observation. L'auteur a pris son couple dans la bourgeoisie, dans la moyenne, pour être plus également près des classes extrêmes, d l'aristocratie et du menu peuple. Et en ceci encore il a bien fait. De la sorte, son œuvre sera accessible à tous et à toutes. Que prouvent  les pusillanimités de la critique!...Et qu'importe après tout que cette critique soit si timorée quand les mœurs sont si téméraires?...Nous crierons toujours pour nous = à bas les masques!... Et nous soufflerons sur les bulles de savon de la vertu de ce siècle!... Nous en avons le droit et le devoir, car nous avons éternellement présente à l'esprit la parole de Proudhon = La lâcheté des consciences vient de la lâcheté des amours, et c'est pour cela que nous approuvons Mr. Belot, hautement, sans détours, sans flatterie comme sans crainte!... Eh quoi!... la passion qu'il décrit est partout, timide ou hautaine, insinuante et impérieuse, et il faudrait n'en point parler!... Paris est en proie à l'embrasement qu'elle développe, et nous voyons les langues de feu de cet incendie se glisser sous la porte du boudoir des ambassades, lécher les vitres des chambres du quartier Latin, et vous voudriez qu'on en parlat point!... On se croit revenu au temps où florissait Mme de Polignac et Melle de Lamballe et nous serions obligés de garder un silence imprudent!... Allons donc!... Laissez-nous donc tranquilles!... Nous voulons parler, et nous parlons!... C'est ce relâchement des mœurs qui produit cet énervement des courages, et la servitude des sens engendre l'esclavage des âmes. Pourquoi donc puisque nous la connaissons ne la découvririons-nous pas, cette pernicieuse conspiration contre nous autres hommes, au grand jour, sans scrupule et sans pitié, devant tout le peuple assemblé!...

 

 

(... ) à bas les masques !...(...) Eh quoi ! la passion qu’il décrit est partout (... ) et il faudrait n’en point parler!... (...) Laissez-nous donc tranquille!... Nous voulons parler et nous parlons.... (...) Aux hypocrites et aux niais qui nous accusent d’immoralité quand nous faisons purement et simplement notre devoir, nous répondons ceci que : nous sommes les médecins de notre honneur et de notre liberté !”

 

 

(Emile Zola lui-même écrira dans sa préface : “Mr. Belot n’a rien appris à personne, n’a troublé aucune innocence, en racontant la liaison monstrueuse de deux anciennes amies de couvent. Cette histoire-là court notre société gâtée jusqu’aux moelles. Le crime de l’auteur est simplement d’avoir troublé la quiétude des gens qui préféraient se raconter l’histoire en question entre deux portes, à la voir circuler librement avec toutes ses conséquences vengeresses (...)  Cesser de cacher son livre et mettez-le sur toutes vos tables comme les pères y mettaient les verges dont ils fouettaient leurs enfants. Et, si vous avez des filles, que votre femme lise ce livre avant de se séparer de ces chères créatures et de les envoyer au couvent...”

 

 

 

Extrait de "Melle GIRAUD MA FEMME" (page 240 )

 

« Peu  à  peu,  on  se  lie,  et  on  arrive  à  aimer  de  toute  son  âme  celle  qui  la première  vous  a  témoigné  un  peu  de  sympathie,  lorsque  toutes  vous traitaient encore en étrangère. Il est si facile de faire la conquête d’un cœur de  quatorze  ans !  il  se  livre  avec  tant  d’abandon  et  il  est  si  joyeux  de  se livrer ! Oh !  si  c’était  un  homme  qui  vous  disait :   Quelle  jolie  taille  vous avez !  j’adore  vos  yeux,  vos  mains  sont  charmantes,  laissez-moi  les admirer ! d’instinct  on  rougirait,  on  se  sauverait  bien  vite  pour  ne  pas entendre  de  tels  propos.  Mais  c’est  une  femme  qui  parle,  une  jeune  fille comme vous ; on l’écoute sans se troubler, souvent avec plaisir, et on lui rend des compliments en échange des siens.

 

De  compliments  en  compliments  et  de  confidences  en  confidences,  votre compagne  prend  de  l’influence  sur  votre  esprit ;  elle  est  au  couvent  depuis plusieurs  années,  vous  y  êtes  seulement  depuis  un  mois  ou  deux ;  elle  en connaît  tous  les  détours  et  elle  vous  les  fait  connaître ;  elle  est  en  même temps  plus  faite,  plus  formée,  plus  expérimentée  que  vous ;  elle  met  son expérience à votre service, et comme vous êtes à un âge où l’on ne demande qu’à s’instruire, vous écoutez.. Bientôt ce n’est plus seulement de l’affection que vous avez pour elle, c’est de la crainte et du respect. Vous vous trouvez ignorante, petite auprès d’elle ; elle  en  est  arrivée,  en  captant  tous  les  jours  davantage  votre  confiance,  en s’immisçant dans votre vie, en exerçant sur votre esprit une sorte de pression lente  et  continue,  à  vous  obliger  à  ne  voir  que  par  elle,  à  vous  ôter  la conscience  du juste  et  de  l’injuste,  à  vous  dominer,  à  vous  asservir  à  ses caprices.

 

Parfois  on  essaye  de  secouer  le  joug ;  on  ne  peut y  parvenir :  mille  liens indissolubles, mille  souvenirs  tyranniques  vous  enchaînent  l’une  à  l’autre, jusqu’à la sortie du couvent. A cette époque seulement les liens se brisent, les souvenirs s’effacent… à moins pourtant, ajouta-t-elle en baissant la voix, que le hasard, ou plutôt la fatalité, vous réunisse de nouveau, et alors…

 

- Alors ? demandai-je.

 

- Alors, murmura-t-elle, on est perdue… !»

 

 

 

 

 

Croquis - Jean Gérard Dubois
Croquis - Jean Gérard Dubois

 

Aimons toujours! Aimons encore!  

VICTOR HUGO

 

Je préfère aux biens dont s'enivre
L'orgueil du soldat ou du roi,
L'ombre que tu fais sur mon livre
Quand ton front se penche sur moi.

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Détail d'un dessin
Détail d'un dessin - Crayon graphite
Travail sur plaque d'argile crue, par J.D.Dubois, d'après un croquis d'Arès Antoyan.
Travail sur plaque d'argile crue, par J.D.Dubois, d'après un croquis d'Arès Antoyan.